Tocs... et rites d'écriture.




En quelque château calme et familier, j'éveille ma plume à la fin du jour, l'agite fébrilement jusqu'au creux de la nuit, puis, de guerre lasse, l'abandonne au petit matin, sèche ou ravie. Triste, heureux, je m'attelle à l'écritoire, libérant ce trop-plein d'esprit, jetant sans contrainte ces bases inchangées: entrouvrir d'innombrables huis que l'imagination a forcés, et jouir de l'accès immédiat qu'ils donneront au genre qu'elle m'impose. Ce sont alors des envolées qui ne me laisseront guère de repos jusqu'au jour levé.

Cela proviendra-t-il d'un endeuillement, d'une promesse d'allégresse?

En ce raz-de-marée d'encre noire, dont tout d'abord, je suis le seul à comprendre ce qu'il charrie, j'appréhende ces voiles gonflées, ces assauts d'alizés rageurs qui ne me porteront, au mieux, qu'aux frontières d'une mer introuvée.Vague ressac qu'une âme propre à s'émouvoir a su déceler entre deux rochers qui s'effritent et s'entrechoquent dans ma caboche. Puis, voguant entre deux chapitres, je fais connaissance avec une île habitée où quelqu'un m'attend, l'oeil sévère.

S'il ne s'est imposé de lui-même, telle une enseigne convenable, le titre d'un nouvel ouvrage s'annonce vers la troisième page. J'en gribouille distraitement deux ou trois, et, soudain, apparaît un petit bataillon de mots bien rangés derrière une lettre majuscule qui les commandera tous. Sitôt terminé, j'oublie bien vite mes précédents ouvrages. Mieux, je m'en dépossède, même! Mais, si par la suite, je veux opérer un moindre changement à l'un d'eux, je sais, sans aide, où est la phrase à reprendre, voire un nom propre ou une date. Quand je me surprends à songer avec engouement à ma prochaine besogne, la débutant bientôt d'une première syllabe, le seul mot qui n'en comporte qu'une, réellement plaisant, est celui de: "fin". En réalité, il enclenche surtout l'entreprise d'une nouvelle tâche: la correction.

Des tocs? Un doigt de vin muté des Charentes ou de Porto. Peu vêtu, nu, même; au pire, affublé d'un long chandail troué. Entre les doigts: un petit crayon usé a la mine noire et grasse, sans cesse redéposé sur le bois clair d'une simple table (rectangulaire) En voyage, ou, quand il le faut, les marches d'une église romane, le banc d'un parc gazouillant me voit, inlassable, en cet exercice qui me taraude depuis l'adolescence, le temps où cette devise m'est devenue familière: nulla dies sine pagina!

Gary d'ELS.

 

 
 
Aujourd'hui sont déjà 1 visiteurs (3 hits) Ici!
Ce site web a été créé gratuitement avec Ma-page.fr. Tu veux aussi ton propre site web ?
S'inscrire gratuitement